Vendredi 10 septembre 2010


 

Chers lecteurs et lectrices ;

Ce blog est le dernier d’une longue liste. Pendant des années j’y ai mis mes joies, mes peines, mes peurs, mes douleurs, mes rires, mes angoisses. Tous ont fini par disparaître, plus ou moins intentionnellement. J’ai fini par grandir, changer, évoluer – plus ou moins intentionnellement.
Et avec le temps, avec chaque jour qui s’écoule, je me fais de plus en plus de remarques, d’observations sur le monde et les gens qui m’entourent. Ici, je vais vous les faire partager. Et comme la vie est parfois drôle, parfois beaucoup moins drôle, il y aura des mots tristes, des paroles bouleversantes peut-être, des phrases maladroites et mal construites, mais il y aura également de l’humour, de la passion, des éclats de rire, de l’envie et de la lumière.

 

En lisant ces lignes, vous entrez dans mon univers. A vos risques et périls…

Welcome home.


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           Lorsqu’une nouvelle année commence – parce que oui, pour une certaine catégorie de la population qu’on désigne couramment sous le terme d’« étudiants » - elle s’accompagne inlassablement de son lot d’équipement neuf en tout genre, de séances shopping, de derniers débroussaillages du reste des soldes, mais aussi de résolutions et de changements divers et variés. Du genre : «  cette année, je serai optimiste, confiante, travailleuse telle l’abeille butinant du soir au matin, amicale, souriante. » On se promet de positiver, de laisser sa cape de cynisme et de pessimisme derrière soi et de s’élancer avec entrain vers l’avenir.

C’est toujours ce qu’on dit les premiers jours. D’accord. C’est toujours ce que je me dis les premiers jours, mais je suis à peu près certaine de ne pas être la seule, même si tout le monde déteste l’avouer.

Il suffit de se retourner en arrière, voire même de se contenter de légèrement tourner l’œil, pour constater que l’année passée n’a pas été très glorieuse. Pour résumer : deux séparations très douloureuses, l’une clôturant à jamais la dernière page d’un livre écrit deux ans auparavant et qu’on destinait à devenir le chef d’œuvre de toute une vie ; l’autre détruisant un coup de foudre bref mais intense ainsi que tous les rêves, la fraîcheur et les envies qui accompagnent un tel élan amoureux, comme une bougie qu'on souffle brusquement une nuit d'hiver glaciale. Une autre séparation, plus définitive celle-ci, d’un ami qu’on croyait dans les parages à jamais et qui a pris la tragique décision de se limiter à « jamais ». Une année de remise en question, de drames familiaux et sentimentaux, de bouleversements intérieurs, mais une année peut-être nécessaire pour en commencer une nouvelle. Plus belle. Forcément plus belle, non ?

… Pas forcément. Ce sont les mots que les derniers jours ont imprimé dans mes pensées, comme une migraine sourde et douloureuse qui guette, attendant le moindre instant pour ressurgir tel le diable de sa boîte. Hier, j’ai perdu quelque chose.

 La journée se déroulait tranquillement, quand le téléphone sonne. La plus vieille amie de ma mère, un membre à part entière de la famille, dont la voix tremble lorsque je décroche. L’angoisse me saisit, l’appréhension qu’une chose horrible se soit passée s’installe. Après deux heures de conversation dont je ne capte que des bribes, je comprends. Son mari vient de la quitter. Banal, non ? Tellement banal que ç’en est triste. Combien de couples se séparent chaque jour ? Des dizaines, des centaines ou peut-être des milliers ? C’est devenu monnaie courante. Pourtant, chaque couple est unique, il est des couples dont on se dit « ils sont inséparables ». Prenez Startsky et Hutch, Bonnie and Clyde, Dupont et Dupond, Tintin et Milou, Edward et Bella, enfin les exemples ne manquent pas. Ils ne sont rien l’un sans l’autre, n’est-ce pas ? Il en était de même pour ce couple, jusqu’à ce que quelqu’un d’autre croise leur route, jusqu’à ce que tout change, tout s’effondre. Pourtant il était l’homme parfait, et ça n’engage pas que moi, de l’avis général, cet homme est parfait. Fidèle, attentif, drôle, attentionné, affectueux, beau, grand, enfin la totale quoi. Toutes les filles en rêveraient. Pour moi, ce couple était un modèle, il représentait l’espoir, l’avenir, l’amour, la passion. Et voilà qu’il s’effondre. Autant vous dire que je me suis sentie toute bizarre. Qu’est-ce que vous vous diriez si l’homme que vous considérez comme parfait trompe sa femme ? Si le couple que vous pensiez inattaquable s’écroule ? Avouez que ça remet pas mal de choses en question. Ça remet pas mal de cynisme sur la planche. Comment gérer cette destruction constante des choses auxquelles on tient ? Est-ce la peine de bâtir quelque chose de fort, de durable, d’invincible, si tout peut se ratatiner comme un château de cartes d’un instant à l’autre ? Faut-il encore croire en l’amour s’il ne mène plus à rien ?

Ce sont ces questions sans réponse qui m’étreignent depuis. Accompagnées de peine, de tristesse, de désespoir. C’est vrai, le XXIème siècle offre tout ce dont on peut rêver : communication instantanée, information en temps réel d’un bout à l’autre du monde, technologie sophistiquée… Mais si la machine a gagné, le cœur a bel et bien perdu. Les gens sont seuls, inventent mille et une tactiques pour combler leur solitude, leur vide existentiel, et heureusement ( !) certains y arrivent. Mais pour d’autres, d’un instant à l’autre, tout s’effondre. Et la peur, la solitude, le vide, recommence… Boucle incessante qui donne à réfléchir. Et qui attaque sérieusement les bases de l’optimisme. Il faut le dire : en ces temps, l’optimisme a la vie dure. Les jeunes censés être dynamiques et enjoués redoutent l’avenir, ne savent plus à qui se fier. On nous répète à longueur de temps qu’aucun travail ne nous attend, que les études ne mènent plus à rien mais qu’il est nécessaire d’en faire quand même, que la société va mal, que les pays se marchent dessus pour faire toujours plus de profit, que les gens deviennent dingues et que ce qui était il y a quelques siècles une balade au clair de lune ressemble aujourd’hui à une agression armée dans une ruelle glauque. Avec toutes ces informations noirâtres qu’on nous jette à la figure en permanence, comment continuer à rêver ? À aimer ? À imaginer ? À créer ? À construire ? L’ignorance est-elle la seule issue pour vivre heureux ? Faut-il devenir une autruche, plonger la tête dans le sable en chantonnant pour se bâtir son petit monde sans rien voir ni entendre du dehors ?

Tout le monde a des questions, mais qui donc détient les réponses ?

 En tout cas, une chose est sûre, si l’on arrête de croire, autant s’allonger par terre et se laisser mourir tout de suite. Et puis, qui sait… Peut-être l’homme parfait finira-t-il par s’apercevoir de la gigantesque erreur qu’il a commise, peut-être reviendra-t-il auprès de sa femme pour lui dire qu’il l’aime et qu’il n’aurait pas dû attendre de la perdre pour s’en rendre compte, peut-être vivront-ils heureux jusqu’à la fin des jours et peut-être pourrai-je bientôt me dire :  je le savais. L’espoir existe encore.


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 Samedi 11 septembre 2010


C’est dingue comme tout peut commencer avec du vocabulaire d’italien (Oui parce qu’il faut dire que quand vous vous êtes tapé cinq ans d’italien avec la pire prof du monde et que vous savez tout juste commander cinq pizzas au resto le plus proche du camping – ma notion de la géographie est également très approximative, d’où les sauts de neuf-cent kilomètres qui interviennent souvent sans que personne sauf moi, et c’est déjà pas mal, comprenne pourquoi… - vous avez bien besoin d’apprendre un peu de vocabulaire).

Donc, on disait : il broncio, bouderie ; il broncio, bouderie ; il…

Et là, sans savoir pourquoi ni comment, par un pur hasard ou une énième farce du gus assis dans son nuage en train de se bidonner en mangeant du Ritter Sport, vous vous retrouvez le nez collé à l’écran en train de cliquer partout comme la vraie geek que vous vous révélez être.

« Ohhhhh, un nouveau blog ! »

« Oh, une super vidéo… »

« Tiens, je me demande s’il a pas d’autres blogs intéressants dans sa liste de favoris… »

Et là. Et là. Là vous buguez complètement (ça se voit pas ?). Parce que là, à ce moment précis, d’un minuscule clic de souris, vous vous retrouvez projetée six mois en arrière, comme si vous aviez pris un portoloin sans être préparée psychologiquement à l’effet de mal au bide extrême et de nausée que ça comporte. Vous lisez les premières lignes, les premiers mots, et immédiatement vous comprenez. Evidemment, après presque trois ans d’histoire passionnelle et fusionnelle vous ne pouvez que le reconnaître au premier coup d’œil. Lui. L’homme de votre vie. Votre âme-sœur. Celui qui vous a brisé le cœur six mois plus tôt. Eh oui : en deux tapotis de clavier et trois clics de souris vous vous êtes retrouvée face à face – ou presque – avec votre ex, qui vit à plus de cinq cent kilomètres de vous, et dont vous n’avez plus entendu le moindre mot depuis des mois.

Subitement, votre pouls s’accélère, votre tête se met à tourner, tout se brouille autour de vous et si en baissant les yeux sur votre livre d’italien vous apercevez des taches humides, c’est parce que vous pleurez. Incroyable, non, comme tout peut basculer d’une seconde à une autre. Un bond dans le passé, un bond dans le futur, comme quoi finalement le temps qui passe est une notion très abstraite…

Soudain vous vous retrouvez désarmée. Vous ne savez plus quoi faire. D’un geste rageur, vous essuyez vos larmes. Il n’en vaut évidemment pas la peine. Votre premier réflexe est d’envoyer un message catastrophé à votre meilleure amie : « Viens de tomber sur le blog de J. Help. » (la nouvelle définition de J étant Jeuneconnarddépourvudumoindrecourageincapabled’assumerquoique
cesoitetterrépourlerestantdesesjoursdanssapetiteviemerdiquesansmê
meserendrecomptequ’ilaperdulameilleurechosequiluiétaitjamaisarriv
ée, oui, parce qu’il faut quand même conserver un minimum d’anonymat…). Votre deuxième réflexe : faire un virement sur votre compte courant en prévision de faire du shopping dans l’après-midi. Le shopping c’est toujours bien pour ce genre de cas. Et vous n’êtes pas une fille pour rien. Et votre troisième réflexe : vous jeter sur votre lit, au milieu de vos chatons prêts à vous apporter affection et chaleur, avec Scorpions qui tourne sur votre chaîne-hifi et vous enfouir le visage dans un coussin pour pleurer toutes les larmes de votre corps. Mais vous vous dites : « c’est simplement parce que je n’y étais pas préparée. Je l’ai oublié. Tout est derrière moi maintenant. » Et votre chat vous regarde comme pour vous dire « tu te berces d’illusions ma vieille ».

Non, évidemment, rien n’est oublié. Tout est encore là, tout frais, dès que vous fermez les yeux vous entendez son rire, dès que vous croisez le regard d’un Sublimo italien beau comme un Apollon vous pensez à son regard, du même vert aquatique si rare et si captivant. Mais vous faites semblant, parce que comment faire autrement ? La vie continue. Le soleil brille toujours – enfin, de temps en temps. La nuit succède toujours au jour. Il y a toujours des révisions à faire au lieu de pleurnicher sur des histoires terminées. Et surtout : il y a toujours de magnifiques jupes en réduction chez Entr’Elles. Et au final, n’est-ce pas tout ce qui compte ?


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 Dimanche 12 septembre 2010


Je me suis rendue compte de quelque chose, récemment. J’ignore si ça vaut pour toute la population ou si ça ne concerne que mon habituelle malchance, mais il semblerait que la bien connue technique de l’élastique (qui ne concerne absolument pas un élastique projeté en pleine vitesse dans votre visage comme tout le monde en a, j’en suis sûre, des souvenirs traumatisants de l’école primaire, mais la technique décrite dans la bible : Le Journal Intime de Georgia Nicolson, et qui se résume à peu près à cette sentence, « Suis-moi je te fuis, fuis-moi je te suis ») ne soit absolument pas efficace sur moi.

Non, avec moi, il semblerait plutôt que les hommes qui me plaisent me fuient, et que j’attire ceux qui ne me plaisent pas. J’ai dû avoir environ douze millions de propositions on ne peut moins intéressantes lors de ma courte mais nonobstant brillante carrière de serveuse cet été, j’ai des prétendants abonnés à l’année, mais alors ceux qui m’intéressent, que nenni. Je ne vous parle même pas de ceux (ou celui, en l’occurrence, non je ne suis pas nymphomane) dont je suis amoureuse ! Alors là c’est carrément La Grande Vadrouille, les altercations gênantes entre deux couloirs, les regards furtifs et paniqués ou, de temps à autre, les dialogues constructifs :

« - Je t’aime

  -  Et moi je te déteste. Casse-toi de mon chemin. »

Oui, j’ai bien peur d’avoir la relation amoureuse un peu brusque, voire même carrément agressive ou violente par moments. Je dois être sado-maso, parce qu’en plus je m’obstine ! Alors parfois je peux être un vrai cœur d’artichaut, tomber folle amoureuse au premier regard, mais des fois quand j’y suis, j’y reste ! Même si je vois très bien que c’est inutile d’attendre des siècles le moindre geste ou la moindre parole de l’élu de mon cœur à égard. Parce qu’en plus je les choisis compliqués, et avec un ego surdimensionné, c’est du genre « j’ai décidé ça alors je m’y tiens, quel qu’en soit le prix ». Alors qu’il ait changé d’avis ou pas, dans tous les cas, je n’en saurai jamais rien, puisqu’il ne m’adressera plus jamais la parole. Youhou. 

Mais qu’est-ce que je peux bien y faire ? Nichts. Absolument nichts. Je n’ai qu’à attendre de retomber amoureuse, de quelqu’un d’autre, quelque part d’autre, quelqu’un avec qui j’aurai un peu plus de chance… (Et si possible, quelqu’un d’aussi beau, gentil, affectueux, attentionné et diablement sexy qu’il l’était – et l’est toujours, probablement, mais je n’en profite plus – quand on s’est rencontrés. Voilà, merci d’avance père Noël).

Ou alors au même endroit. Oui parce que figurez-vous que les meilleures choses arrivent toujours quand on s’y attend le moins, et pour illustrer cet exemple je suis tombée nez à nez avec Apollon in personata mardi dernier. Pour poser le décor, j’allais en italien, cours communément défini comme le plus pénible et le moins intéressant du monde (juste après la géographie) avec une prof anti-pédagogue que je me traîne depuis cinq ans. Donc, j’allais revoir ma vieille copine, attendant d’un air morne avec un écouteur enfoncé dans l’oreille crachant du métal à travers le couloir, résignée. Quand je Le vois. D’abord de dos. Une grande silhouette, large d’épaules, pull bleu azur et jeans judicieusement cintré. La prof arrive ; on entre dans la salle. Après m’être installée je repose le regard sur la salle pour Le repérer. De l’autre côté de la rangée. Et là… j’arrête de respirer. Les cheveux brun foncé artistiquement ébouriffés, le teint halé de celui qui est exposé toute l’année au soleil sans le faire exprès, des lèvres rouge carmin pulpeuses que je me pâmerais d’embrasser, de belles mains aux longs doigts fins qui attrapent une paire de lunettes de lecture et les juchent sur un nez parfaitement droit (et Merwyn sait que je suis difficile avec les nez). Il tourne la tête vers moi et j’ai le loisir d’apercevoir des yeux d’aquarelle, mi-bleu mi-vert, à couper le souffle. Reflet parfait de la mer à l’apogée de la journée, là où elle est le plus belle. Je dois encore attendre une heure avant d’entendre de sa bouche qu’il est italien, qu’il vient d’une école française à Milan et qu’il a un léger reste d’accent à peine décelable pour qui n’a pas l’habitude d’entendre régulièrement de l’italien courant. Mais que j’entends. Et là, je craque, et je suis juste encore assez lucide pour me dire : je le veux.

Comme quoi, dans la vie, il suffit parfois d’avoir des objectifs.


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 Lundi 13 septembre 2010


Aujourd’hui, j’ai constaté quelque chose de vraiment insolite. C’est dingue comme il y a des choses qui peuvent nous échapper, comme des gens qu’on croyait connaître se retrouvent soudain mutés en étrangers dont seul le nom nous est familier, et encore…

J’étais donc en cours, en train de tenter de garder les yeux ouverts malgré la voix soporifique de mon prof de moderne qui me berçait au rythme des « élites urbaines », « statutaires », « classe bourgeoise » et autres mots germains que je ne saurais nommer. Et croyez-moi, c’est loin d’être aisé de rester éveillé lorsqu’il est huit et demi du matin et qu’on ne s’intéresse absolument pas aux sociétés urbaines du XVIème siècle. Je faisais toutefois mon possible, laissant néanmoins mon regard dériver dans la pièce de temps en temps, histoire que mes paupières ne se mettent pas en veille. Il faut dire que j’étais assise autour d’une table en U, comme par hasard juste en face de mon ex (que nous appellerons Le Comte pour des raisons… personnelles, que je ne révèlerai pas ici dans un souci d’anonymat, et qui n’ont, je vous rassure, strictement rien à voir avec Good Morning England – qui est indéniablement, si on va par là, un chef d’œuvre cinématographique à voir et à revoir), que cette situation contrariait au plus haut point, et qui s’évertuait à fixer le prof assis à l’autre extrémité du U, se provoquant, j’en suis sûre, un torticolis très douloureux. L’avantage était bien sûr que j’avais tout le loisir d’observer son petit manège, moi à qui ça ne posait aucun problème de le regarder – ou lui parler. Ou l’embrasser. Ou le… Hum, bref, passons.

Et là, alors que je souriais d’un air narquois (qu’il ne voyait pas), je vis ce truc qui a bien failli me faire perdre la boule. Une fois n’est pas coutume, après m’être frotté les yeux pour vérifier que je ne rêvais pas, j’ai discrètement sorti mon portable de ma poche et j’ai envoyé un sms paniqué à ma meilleure amie, que nous nommerons ici epok.cowblog.fr (je sais, je sais, c’est mal).

J’hallucine ! J’hallucine ! J’hallucine ! Le Comte a un collier ! Un COLLIER !”

Je vous explique toute l’étrangeté de la chose : durant le temps où nous étions… proches, on va dire, j’ai vaguement essayé de lui faire porter un bijou – parce que je ne sais pas vous mais moi je trouve ça très sexy sur les mecs – et il m’a aussitôt rétorqué qu’il en était hors de question et qu’il détestait les bijoux. Il déteste les bijoux. Alors… Comment ?! Qu’est-ce que le point ?

La question m’a tourneboulée toute la journée et j’en ai déduit une seule solution possible : il n’y avait qu’une fille pour lui mettre la corde au cou, et il était donc plus que probable qu’il ait une copine. *Décès du sujet*

J’ai donc marmonné en boucle toute la journée « Non mais je rêve, il ose avoir quelqu’un avant moi, ce salaud briseur de cœur, ce cœur de pierre, cet entêté, borné comme pas deux, non mais je rêve ! »

Et maintenant que je suis rentrée chez moi, attablée devant mon clavier et en train d’écrire, je me rends compte que cette réaction démesurée à l’égard d’un simple collier n’est probablement qu’une histoire de regrets, de nostalgie et de jalousie. Jalousie de la fille hypothétique avec qui il serait, nostalgie de ce qu’on a vécu ensemble et de savoir que ça ne se reproduira jamais, et regrets de l’avoir suffisamment laissé s’éloigner pour ne pas savoir s’il est susceptible d’avoir changé d’opinion sur les colliers, ce qui peut bien avoir assez d’importance pour être suspendu autour de son cou et si c’est de son propre fait ou de celui de quelqu’un d’autre.

C’est étrange de s’apercevoir que quelqu’un dont on était si proche soit à présent si distant, qu’une personne avec qui on a partagé de l’affection, de l’amour, de la tendresse, du désir, se comporte comme un étranger. Alors oui, c’est ridicule. Oui, c’est inexplicable. Et oui, ça révèle de forts troubles intérieurs, mais ça n’empêche que…

Qu’est-ce que le point de ce p*tain de collier ?!

P.S. : de l’autre abattis, demain j’ai italien. Ce qui signifie Sublimo en perspective. J’ai d’ailleurs décidé de la combine à adopter destinée à obtenir l’information mailesque. Je vais lui annoncer que je dois écrire un mail en italien à une gentille madame qui a proposé de m’héberger à Venise en février (véridique), mais que vu mon niveau d’italien plus que lamentable (véridique) j’aurai beaucoup de mal à écrire seule quelque chose de lisible et raisonnablement sensé (véridique). J’ai donc immensément besoin de son adresse mail (plus que véridique) histoire de tester son niveau de gentillessitude et de l’employer à temps partiel comme correcteur de mail privé.

Brillant, n’est-ce pas ? La suite au prochain épisode !


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Mercredi 15 septembre 2010 


Devant la teneur chargée en nullitude de ma journée, qui a débuté en tant que « sortie de début d’année » et qui s’est en vérité soldée par des visites de musées assommantes coupées par des « pauses » d’une heure et demi d’errance sous la pluie, par des températures glaciales, sur un parking désafecté, et de voyage en bus conduit par un individu analphabète et illettré, je me vois dans l’obligation de réduire la longueur de l’article d’aujourd’hui.

Parce que oui, quand on a pataugé dans des flaques toute la journée, qu’on est trempé, gelé, désemparé, affamé, et stressé par le fait de n’avoir absolument rien révisé pour sa colle du lendemain (la joie des prépas…Surtout, ne vous laissez jamais enrôler), absolument rien préparé pour son départ en week-end à six-cent kilomètres du surlendemain, et absolument pas utilisé la précieuse information qu’on attendait depuis une semaine, on est un peu pressé par le temps.

Vous l’aurez deviné, cette précieuse information, c’est… L’adresse mail de Sublimo ! Eh oui, je l’ai obtenue ! Je vous retranscris la conversation de la victoire :

« - Salut ! Dis, je voulais te demander… Je dois écrire un mail à une madame en Italie qui m’a invitée à venir à Venise chez elle en février, pour régler les modalités et tout ça, enfin bref, je voulais savoir si par hasard tu voudrais pas me passer ton adresse mail pour que je te l’envoie et que tu me le corriges avant, parce que vu mon niveau d’italien...

-  Aucun problème *sourire radieux* »

Et voilà. Je l’ai. Maintenant, une nouvelle question se pose à moi : qu’est-ce que je vais lui dire la première fois où je vais lui parler pour ne pas avoir l’air d’une désespérée totale ?

Si vous avez des idées, n’hésitez pas, je suis preneuse ^^


Bon, alors, on disait… *se plonge dans ses révisions*


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Mercredi 22 septembre



Lundi, j’ai pris une année. Outre le fait que je trouve ça plutôt angoissant de continuer à cumuler des années passées à ne rien faire de sa vie, ce n’est pas l’objet de cette chronique. Non, en fait je vais plutôt vous parler de la manière dont j’ai fêté cette triste nouvelle : voilà dix-neuf ans que je ne fais rien de plus passionnant qu’aller en cours sans que ma vie ait le moindre aspect trépidant.

Sauf que voilà, pour une fois, elle l’était (trépidante, s’entend). Je me suis embarquée dans une grande aventure, qui a commencé vendredi dernier à 9h. Faisons un petit retour en arrière sur tout ça…

Vendredi 17 septembre

 

Neuf heures. Je finis de charger mes affaires dans la voiture, veille à ne pas oublier mon manteau en cuir, prends mes clés de voiture sur le meuble et pars sans me retourner, direction Versailles. Un long week-end m’attend : après 500 km de route dont 150 passés sur une route droite interminable limitée à 90 km/h et sans la moindre station service, m’obligeant à explorer les limites jamais explorées de la résistance de ma pauvre vessie, je récupère Epok et nous partons, deux heures plus tard, pour la Normandie. Nous arrivons à Caen tard dans la soirée, éreintées par les nombreux bouchons que nous avons dû traverser, et nous demandons encore plus ou moins si toute cette route valait vraiment le coup…

Samedi 18 septembre

 

Onze heures. Les deux heures précédentes ayant été destinées à endosser nos costumes minutieusement composés avec les moyens du bord (à savoir un costume de pirate intégral avec tricorne et veston pour Epok, et un attirail d’elfe noire à base de corset et d’oreilles en latex pour moi), nous arrivons sur les lieux du Festival Cidre et Dragon, point culminant de notre épopée. Un festival médiéval et fantastique que nous découvrons avec stupeur, étendu dans toute la ville de Merville-Franceville-Plage, et qui s’étend devant nous avec sa paille sur le sol, ses échoppes qui fleurissent dans toutes les rues, ses panneaux indiquant une « Ecole de Dragonnier », une « Taverne de Recrutement des Aventuriers », un « Terrain de Trollball » ou encore une « Arène de Combats ».

Nous débarquons dans un autre univers. Notre univers.

Ici, le monde fade et triste du XXIème siècle n’existe plus. Les « fashion victims » et les « tektonik killers » sont balayés par les chevaliers en armure, les dames du Lac, les gobelins, les sorciers. Les grands méchants du XXIème siècle (braqueurs, agresseurs en tous genres ou qu’en sais-je encore) sont remplacés par des Uruk’Aï, des trolls, des nains ou des ogres.

Nous nous intégrons tout naturellement à l’un des clans, les Brasiards, opposés aux Venguins, et développons une répulsion toute aussi naturelle à l’égard de nos rivaux. Les combats éclatent dans les rues sans que personne ne s’en étonne, tout un chacun est armé et, pour une fois, ce sont les civils vêtus de jeans et de joggings qui choquent les badauds et sont considérés comme des intrus. Ce monde à la fois nouveau et ancien coule sur nous comme une deuxième peau et, au fur et à mesure que nous rencontrons des organisateurs, des mages qui nous confient des quêtes incongrues, des profs de philo transformés pour l’occasion en conférenciers sur des œuvres de fantasy, des commerçants et artisans divers et variés, une certitude s’impose à nous : nous sommes chez nous.

Et encore, nous n’en sommes qu’au début des festivités : le samedi soir, l’un des plus fantastiques concerts du groupe de pagan folk Omnia qui m’ait été donné de voir se déroulait sur une scène montée en plein milieu d’un champ, bondé de fans à moitié hystériques, enveloppés dans des capes pour se réchauffer. Alors je me laisse bercer par l’inspiration, me laisse emporter par la voix mélodieuse de Jenny, le timbre grave de Luka et les discours enflammés de Steve, me laisse aller à oublier la vie en-dehors de ce cocon tellement agréable où tout ressemble exactement à la vie dont j’avais toujours rêvé…

Après le concert nous finissons la soirée devant un spectacle de feu et enfin sur la plage, avec le bruit des vagues en arrière-plan, autour d’un feu de joie, à écouter des histoires de chevaliers et de princesses contées par un dénommé Tortequesne. Même au moment de rentrer, mes pensées restent sur cette plage, dans cette ville, entre terre et mer, entre XIIème et XXIème siècle, parce que je sais que l’aventure est loin d’être finie…

Dimanche 19 septembre

 

Onze heures. Parées de nos plus beaux atours, nous retournons au festival, nos costumes complétés d’éléments achetés la veille (une cape en velours noir pour ma part, une dague pour Epok – nous avons passé tout le week-end à nous lamenter sur le fait que, pour la première fois de notre vie où ç’aurait été à point nommé, nous ne soyons pas armées) et nous réjouissons de ce qui nous attend pour cette journée.

 

Au final, nous assistons au massacre d’un évêque par une bande de pillards moribonds, encourageons les équipes finalistes du fameux tournoi de Trollball (sport qui s’avère consister en une bataille organisée à base d’épées, le gagnant étant celui qui réussit à s’emparer de la tête de troll), cherchons en vain, à mon plus grand dam, à retrouver le charmant organisateur avec lequel nous nous entretenions la veille, goûtons à des plats et boissons médiévaux à en damner une dieu scandinave et mirons un « spectacle dont vous êtes le héros » à mourir de rire.

Ce n’est qu’au moment de rentrer, en franchissant pour la dernière fois les grilles de cet endroit qui nous était devenu étrangement familier en si peu de temps, que nous sentons naître une boule dans notre estomac, nous signalant amèrement qu’il faudra attendre très très longtemps avant de se sentir à nouveau aussi bien quelque part…

Lundi 20 septembre

 

Ereintée mais inspirée et des étoiles plein la tête, je repars pour sept heures de route jusqu’à mon chez-moi… Mais en franchissant le portail de la maison, les nouvelles chansons d’Omnia défilant en boucle dans ma voiture, une réalité s’impose à mon esprit : j’étais bien plus chez moi dans ce petit village normand, peuplé de gens costumés bizarres avec un langage incompréhensible, une vêture pour le moins suspecte et des activités hors du commun, que dans mon village natal, où j’ai toujours grandi.

Bizarre ? Pas tant que ça, non. Mais seuls des Brasiards pourraient comprendre…

P.S. : juste pour le plaisir, une petite compilation des meilleures diatribes du week-end

 

Vieux gus merwynesque assis sur devant sa table : « Que pensez-vous de la coloration des nuages ? »

 

Merwyn : « Ahhh, vous êtes Brasards »

Gilestel (plus communément connu sous le nom de Grégory-a-priori) : « -siards. Brasiards. »

Merwyn : « -siards »

Epok & Hex en chœur : « -siards »

 

Grégory-a-priori : « Vous avez des épées ? Non ? Ahhh, dommage, vous auriez pu participer au tournoi de Trollball ! »

 

Toujours Grégory-a-priori : « Euh au fait, vous êtes armées ? Non parce que vous pouvez pas accéder au concert avec des armes »

 

Maître du Jeu du Scénario dont Vous Êtes le Héros : « Alors, voici un paysan, que nous appellerons Igor. Donc, Boris… »

 

Démon dudit scénario : « Non mais du point de vue de la mutuelle… »

Guerrier : « Oui c’est vrai que… »

Maître du Jeu (assez hilarant, il faut l’avouer) : « Démon, guerrier, sans vouloir vous offenser, vous voudriez pas un peu de thé et de petits gâteaux avec votre conversation de MAMIE ?! »

 

(Et pour finir…) Steve, chanteur et musicien d’Omnia galérant avec le français : « Donc… Hum… Wolfsong is a song about un petit fils en la forêt… »

 

 

...Nostalgiquement vôtre


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 Jeudi 23 septembre


Aujourd’hui il y avait grève. La grève est le passe-temps favori des français. Dès que le moindre ministre ose toucher à la moindre loi, tout le peuple français se frotte les mains en se disant « ahahaha, si j’étais lui j’aurais pas fait ça, maintenant ça va gueuler ». Et ils organisent une grève. Et lorsque personne ne touche à rien, une grève éclot parce que le gouvernement est incapable. En fait, les grèves sont juste destinées à emmerder les gens qui veulent simplement se rendre en cours/au travail tranquillement, sans ne rien demander à personne.

Cette fois, c’était pour les retraites, qui ont été reculées à soixante-sept ans. Quand on en a tout juste dix-neuf, soixante-sept ans ça paraît interminable, au siècle prochain, mais en y réfléchissant un peu, même si maintenant les gens vivent jusqu’à plus de cent ans, soixante-sept ans ça reste pas mal vieux. Et je doute que tout le monde puisse encore, à soixante-sept ans, se lever le matin à six heures et rentrer à dix-neuf heures pour préparer la popote.

Et si tout le monde finit par travailler jusqu’à près de soixante-dix ans, qu’est-ce que ça veut dire pour nous, gamins de dix-neuf ans plongés dans les études jusqu’au cou, qui nous semble bien plus proche ? ça veut dire que lorsque nous sortirons du parcours pénible et fastidieux des études, bardés de diplômes, en se disant « Eh ben c’était pas trop tôt, passons à la suite des festivités », on s’apercevra juste que la suite, c’est… Rien. Parce qu’il n’y aura aucun travail pour nous. Parce que toutes les places seront prises par des vieillards grommelant toute la journée « mais quel boulot de merde ! », boulot que nous, jeunes chômeurs tout frais sortis de l’ENA, on serait bien contents d’avoir.

 

Chaque jour, un petit détail, une minuscule chose, nous rappelle que non, la vie n’est pas un conte de fée. Un soir on rentre de la gym, et bam ! On apprend que son grand-père a un cancer du poumon. On lit tranquillement le journal dans le tram, et bam ! On tombe sur un article résumant qu’il y a de plus en plus de jeunes au chômage. On revient de week-end et bam ! On s’aperçoit que jamais la vie ne ressemblera à ce qu’on voudrait.

 

Je me surprends souvent à me motiver pour des bêtises – faire mes devoirs, ficher des bouquins barbants sur les villes en Europe, me lever pour faire mes séries d’abdos le matin – en me disant que tout ça, cette vie banale et routinière sans grand intérêt dans la marche du monde, n’est qu’un stade en attendant. En attendant quoi ? Je n’en sais rien. Quelque chose, n’importe quoi. Quelque chose de mieux, de plus trépidant, ma vraie vie. Oui, je l’avoue, je suis intimement persuadée qu’après ça, j’aurai droit à une vraie vie, que j’aurai choisie, voulue, désirée, souhaitée, et qui me comblera chaque journée jusqu’à ma mort. Ça c’est quand je suis optimiste et de bonne humeur.

 

Lorsque je suis déprimée, défaitiste ou simplement fatiguée, parfois, une petite voix désagréable me souffle à l’oreille : « et si tu avais tort ? Et s’il n’y avait rien de plus, après ? Si tu n’avais rien à attendre de plus que ce que tu as maintenant ? Twingo, boulot, dodo… Voilà ta vie. Pour toujours. Jusqu’à ce que la mort t’en sépare. »

Evidemment, c’est glaçant comme discours. Vraiment terrifiant, même ; alors je chasse immédiatement cette voix, cette idée, la repoussant comme on repousserait un lépreux.

 On n’oserait pas imaginer que pareille pensée soit véridique n’est-ce pas ? Que le monde fantastique et décalé qui croît dans notre tête ne pourra jamais se réaliser et mourra simplement dans l’œuf ; que cette vie morne où tous les gens sont désagréables, identiques, esclaves des télécommunications, sans jugeote, ni libre-arbitre, à la conduite dictée par la mode et l’air du temps et au cerveau embrumé comme un troupeau de moutons dénués d’intelligence, est la seule qui puisse exister ; que nos rêves sont destinés à se distiller dans notre mémoire pour laisser place à un mental robotique sans imagination, ni inspiration, ni rêve, ni désir. Que l’humanité va disparaître, que l’individualité va disparaître, et qu’il ne restera plus que des robots. Une armée de robots identiques.

 

Une vision à vomir.

Alors je préfère me dire qu’un jour je serai un écrivain, j’habiterai dans un manoir entre forêt et mer, perché sur une colline entourée d’arbres, où je sentirai les embruns sur ma peau et le fumet d’un chocolat chaud posé sur mon bureau. Je serai vêtue d’un de mes t-shirts de musique hyper confortables et je m’installerai confortablement sur une chaise de bureau moelleuse, devant un ordinateur, pour écrire jusqu’à plus-soif. Je ferai uniquement ce dont j’aurai envie, personne ne me dictera ma conduite, et je dénigrerai le monde extérieur qui, il y a fort à parier, ira de plus en plus mal, sera de plus en plus fou, et je briserai les chaînes que la société veut me mettre autour des chevilles.

 

 

Il y en a qui disent que, rester aussi longtemps sans Révolution, pour un français, ce n’est pas naturel.

 

Et moi je dis qu’ils ont raison.


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Mercredi 29 septembre


Il faut bien le dire : ce week-end a été un week-end de merde.

Pour résumer, nous dirons que ma mère a encore arraché le rétroviseur droit de ma Twingo flambant neuve violemment et sans scrupules (évènement qui, chez moi, se produit environ une fois tous les deux mois). Mon père a tenté une acrobatie visant à monter au grenier, grenier se résumant à une petite trappe au-dessus des toilettes s’ouvrant sur dix centimètres de plafond couverts d’araignées et de poussière, et a fini dans en bas de l’escalier, sous une échelle, le dos et les jambes complètement en compote.

L’idiote garce insupportable qui sert de petite copine à mon frère a jugé utile de m’offrir un cadeau d’anniversaire dans le but évident d’acheter mon silence quant au fait qu’elle squatte le domicile familial tous les week-ends sans la moindre gêne, avec une aisance quasi naturelle, sans la moindre politesse, persuadée qu’elle est à l’hôtel et que nous ne sommes là que pour la servir. Evidemment, ça a marché, puisque dès que j’ouvre la bouche sur sa bêtise sans bornes et sa présence insupportable on me taxe d’ingrate, « elle t’a acheté un cadeau d’anniversaire quand même ».

Sinon, j’ai fait une chose que je n’aurais jamais dû faire : je me suis pesée. Ah, je viens de me rendre compte que ce sujet épineux et problématique pour toutes les femmes du monde n’a pas encore été abordé ici ; sachez donc que j’étais au régime (Dukan, si ça vous intéresse) depuis fin août et que j’ai commis la minuscule erreur de craquer deux week-ends d’affilée, le premier à l’occasion de mon anniversaire (au festival susmentionné plus haut dans le blog) et le deuxième ce week-end, justement, à l’occasion d’un ras le bol général. Et au terme de ce week-end, j’ai découvert à ma plus grande horreur, que… j’ai repris tout le poids que j’avais perdu depuis août. Génial. Magnifique. Brillant. Je suis au bord du suicide.

Franchement, autant d’efforts pour ça ! En plus maintenant, évidemment, je n’ai plus que ça en tête : dois-je continuer ce régime ? Est-ce que ça va encore marcher ou me faire grossir encore plus ? Dois-je carrément arrêter de m’alimenter tout court et me laisser mourir dans l’indifférence générale avec mon surpoids, dévorée par des bergers allemands ?

 

Donc voilà où j’en suis. Une voiture avec un rétro en moins, une mère à moitié hystérique (ça c’est pas nouveau), une fratrie pour le moins… bref, un père handicapé et deux chats qui ont du mal à garder le contrôle sur leurs intestins un peu partout dans la maison. Et des tonnes de kilos en trop.

Ah, j’oubliais, j’ai aussi une dissertation de français à faire, une colle à réviser, des livres à ficher, des mauvaises notes à rattraper, etc, etc, etc… En plus de ça je suis conviée de gré ou de force à une joyeuse partie de vendanges en famille samedi après-midi, dissertation ou pas dissertation à rendre lundi. Youpi.


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 Vendredi 1er octobre


Enfin, ça y est. Incroyable mais vrai, j'ai trouvé une seconde pour écrire un article.
Depuis le début de la semaine, je mène une dure vie d'étudiante de prépa. Je suis surchargée de boulot : les profs s'amusent tous, en parfaits sadiques, à nous donner devoirs sur devoirs et à remplir minutieusement et méthodiquement tous les rares moments de temps libre qu'il nous restait.

J'ai donc passé la journée à rédiger une dissertation de français, sur le sublime sujet que voici : "Alain prend parti dans un débat séculaire en écrivant "Il n'y a qu'une méthode pour inventer, qui est d'imiter." Vous présenterez vos réflexions sur la question, en vous appuyant sur des exemples précis empruntés à la littérature ou aux autres arts". Vu mes résultats de l'année dernière dans cette discipline, je ne suis pas vraiment confiante, mais il a fallu le faire quand même, et je me suis donc levée à 9h pour commencer et je n'ai fait que ça jusqu'à 17h30 (ou presque, en alternant avec des périodes de boulimie intense qui m'ont même poussée à aller courir 6 km en 40 minutes après avoir fini mon devoir).

Je devrais donc être contente de ma journée, puisque j'ai fait tout ce que je devais faire - à savoir ma dissertation et assez de course pour ne pas me frapper la tête contre un mur vu tout ce que j'ai mangé alors qu'il y a 4 jours je me promettais de ne plus jamais rien ingurgiter - ; mais d'un autre côté devrais-je considérer une journée où je n'ai fait que remplir des devoirs comme bonne ? Une bonne journée ne devrait-elle pas plutôt être une journée où on a fait que ce qu'on voulait, et pas ce qu'on devait ?

Ce qui me laisse songeuse sur les choses désagréables qu'on est capables de s'infliger à soi-même. C'est vrai, j'aurais très bien pu faire ce devoir dans la nuit de dimanche à lundi et passer la journée affalée sur le canapé à regarder des séries, traînasser sur Internet et dévorer des gâteaux, glaces et tartines de Nutella au lieu de trimer en m'accordant 2 yaourts de trop et quelques tranches de pain de seigle complet sans farine avant de culpabiliser à mort et de manquer de me tuer en courant à travers des nuages de pollen aveuglant et bouchant mes poumons, au bord d'une route surpeuplée de chauffards. Sauf qu'apparemment ce que je voudrais faire et ce que je fais effectivement sont deux choses somme toute assez éloignées l'une de l'autre. Parfois j'ai l'impression d'être Descartes : visiblement mon âme et mon esprit sont deux choses bien séparées, mon esprit et ma raison ayant pris le pas sur mon âme et mon coeur.

D'ailleurs, si j'y réfléchis, je connais plus de personnes qui écoutent leur raison que de personnes qui écoutent leur coeur. Comment ce fait immuable s'est-il installé ? Est-ce lié au fait que la société fait pression sur la nouvelle génération de beaucoup de manières différentes (avec notre futur emploi - ou notre non-futur emploi devrais-je dire, nos goûts, nos idées, nos désirs, nos projets, etc...) au point que nous nous sentons en permanence obligés de nous imposer des choses pour faire quelque chose de notre vie ? Ou est-ce une directive du XXIème siècle de tout le temps s'auto-emmerder comme ça ? Je n'en sais rien, mais le fait est que nous le faisons tous.

Qui ne s'oblige pas à travailler alors qu'on a juste envie de paresser ? Qui ne s'autoflagelle pas avant de se jeter sur un yaourt 0% alors qu'on aurait juste envie de dévorer un gâteau au chocolat tout entier ? Qui ne se force pas à se lever le matin  6h alors qu'on resterait bien couché jusqu'à midi ? 
Moi, en tout cas, je vous le déclare. Et parfois, ça m'agace.


P.S. : surtout qu'à côté de ça le Projet Sublimo a coulé à pic - je me suis désinscrite de l'italien et il a flashé sur une autre fille - ainsi que le Projet Greg-le-Présumé qui n'a pas pipé mot depuis le festival ; en gros ma vie sentimentale en est toujours au point mort.
Sinon, tout va bien.



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Lundi 4 octobre


Ce week-end je suis retombée dans le passé. Comme si j’avais trébuché sur le rebord d’un trottoir et que j’étais passée dans un univers parallèle (sans commentaire…). Et cet univers était rempli d’images du passé, de sons, de bouts de phrase abandonnés dans une boîte mail ou entre deux pages jaunies d’un carnet, de photos reflétant des sourires béats, un bonheur épuré et éternel… Qui n’existe bien évidemment que sur papier glacé.

J’ai basculé en arrière et suis tombée la tête la première dans toute la nostalgie, la mélancolie et le regret que peut laisser une histoire d’amour passionnée. J’ai eu un instant la sensation que ma dernière heure était arrivée et que toute ma vie repassait devant mes yeux, ébahis mais également remplis de larmes. Un moment j’ai cru que tout pourrait recommencer, peut-être, avec de l’envie. Mais je me suis bien vite rendu compte que j’étais la seule à entretenir ce genre d’illusions.

Malgré tout, au fond de moi, il y a une certitude qui demeure, que je n’arrive pas à éteindre. Je peux y mettre tout le cynisme, tout le pessimisme, toute la rancœur que je veux, elle demeure. Cette voix angoissante et douloureuse qui me rappelle que je ne suis pas guérie, que j’ai toujours le cœur meurtri et que je ne fais qu’espérer qu’il ressent la même chose, qu’il fera un pas vers moi, même minime, pour nous rapprocher et me prouver que je ne suis pas une idiote niaise et mielleuse. Mais après quelques échanges de banalité, la réalité me saute aux yeux : il est juste intrigué de savoir pourquoi je réapparais, aussi soudainement que j’ai disparu. Aussi soudainement qu’il m’a laissée disparaître. Mais s’il a tout laissé faire, c’est pour une bonne raison… Je ne lui manque pas. Il ne regrette rien. Il a tourné la page, lui, et n’attend plus rien de moi. Il ne m’aime plus

Alors, douloureusement, la gorge nouée, je referme les yeux, laissant une goutte de rosée s’écouler sur ma joue, et je serre les dents. Ça va passer. Ça va passer.

Ce matin en me levant je savais bien que j'aurais dû rester couchée. Et le pire c'est que ça aurait dû être une bonne journée : il faisait soleil, assez chaud, j'ai eu des bonnes notes (pour une fois) mais aujourd'hui, tout ça ne compte plus. Vendredi encore cela aurait suffi à me rendre heureuse, à faire de cette journée une excellente journée, mais aujourd'hui ça n'a plus la moindre importance. Mes perspectives ont changé.
Je crois que je sombre à nouveau... Mais chut, c'est un secret.



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 Samedi 9 octobre


Je sais, je sais, mes chroniques se font plus espacées, pour plusieurs raisons : premièrement, je suis surchargée de boulot en ce moment, et les rares instants de répit qui me sont accordés sont consacrés à un semblant de repos qui me semble on ne peut plus nécessaire pour ne pas tomber illico dans le coma fatiguique ; deuxièmement, mon moral n'est pas à proprement parler à la hausse ces derniers temps.

J'ai pris une bonne résolution en début de semaine, après un week-end plus que déprimant, une plongée tête la première dans le gouffre dont j'ai eu tant de mal à me sortir, et là je suis plus ou moins accrochée entre deux parois, sans être en bas mais pas tout à fait en haut non plus. Alors j'ai décidé que, de toute manière, le réchauffé c'était jamais bon, et que j'avais besoin de nouveauté. Nouveauté qui implique différentes choses, dont plusieurs que je ne peux pas m'offrir spontanément, comme ça : un tatouage, un piercing, des nouvelles chaussures, un nouveau petit copain et une nouvelle façon de vivre. Vu qu'il y a relativement peu de chances pour que tout me tombe sur la tête comme ça (bon à part le piercing qui est prévu pour dans 13 jours exactement *.*) j'ai décidé qu'il ne tenait qu'à moi, au moins, de changer ma façon de vivre.

Donc, j'ai remis le nez dans des bouquins inspirants et j'ai bouquiné, en écrivant tout dans un joli carnet, vieux cadeau plein de ce qui est devenu des mauvais souvenirs à présent, reconverti pour l'occasion, et je me suis forgé un nouveau mode de pensé appuyé sur tout ça : un peu de New Age, un peu de Wicca, mais surtout beaucoup de paganisme et de culture celtique. J'ai mis mes préjugés divins de côté - un peu, ils sont tenaces - et suis allée jusqu'à me construire un autel, dont je suis contente. Il me représente, il m'inspire, me détend, et m'occupe les pensées quand je le rectifie, modifie et l'embellit.

C'est donc officiel : je me suis convertie au paganisme. Mais un paganisme qui me ressemble, soit avec beaucoup de méditation, de relaxation et relativement peu d'aspects divins (je n'ai pas non plus subi d'exorcisme : je crois toujours que les dieux sont à la fois une superbe excuse pour des dégonflés qui préfèrent penser que leurs actes sont guidés par une espèce d'entité supérieure qui les dispense de toute conscience, et à la fois l'invention la plus destructrice de l'humanité). Etant donné que, selon moi, cette idée de dieux destructeurs entre en totale contradiction avec le reste des idéaux païens (ou néopaïens pour être plus exacte, mais on va faire court) je ne me suis pas encore précisément attaquée à cette question. A vrai dire je n'en suis pas encore à ce stade de mes recherches.

En tout cas j'ai bien l'impression que tout ça va me mener quelque part. Je l'espère. J'espère vraiment que ce nouveau mode de vie, cette philosophie, m'apportera éclairement, illumination, positivisme, optimisme, confiance en soi et en la vie, ouverture d'esprit à l'égard de la nature - et j'en ai peur, des singes dotés de parole qui m'entourent sur cette pauvre planète en loques. Plus que ça, j'espère que je me détacherai enfin de mes pulsions meurtrières, suicidaires, agressives, sanguinaires, ces idées morbides et glauques qui m'envahissent à tous moments, franchissant la barrière mince et oscillante de sérénité que je m'efforce de construire pour tout balayer sur leur passage et me donner simplement envie de tout déchirer, tout détruire, tout casser, tout lacérer, saigner jusqu'à la dernière goutte, massacrer le moindre lambeau de ma peau, me saouler ivre morte, me droguer jusqu'à ne plus savoir si je suis une femme ou une cuillère à pot, me faire tabasser jusqu'à ressembler à un steack haché, me poignarder et m'écrouler dans une vieille rigole sale pour y mourir sans que personne n'y fasse attention.

Alors oui, je travaille, j'étudie, je me convertis, j'embellis, j'allume des bougies, souffle de l'encens, fais des offrandes, des chants, des prières, de la relaxation, des promenades en forêt (enfin je le ferai dès que ça sera les vacances et que j'aurai une seconde à moi), je m'ouvre à la nature, à mon environnement, et me laisse guider. Parce que je veux vraiment avancer, régler tout ce qui ne va pas chez moi une bonne fois pour toutes.

Et pour l'heure, j'ai trouvé ce qu'il me faut : un bon visionnage de Wolverine, suivi d'un épisode de The Vampire Diaries. Après tout, baver sur Hugh Jackman et Damon n'est-ce pas la meilleure façon de reprendre confiance en l'avenir ? ^^


Greenthings


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 Mardi 12 octobre


Aujourd'hui il a failli - et heureusement que ça a seulement failli et que c'est pas effectivement arrivé - m'arriver la pire chose qu'un geek du XXIème siècle puisse imaginer : perdre son ordinateur. Je vais donc vous livrer un témoignage poignant des minutes d'angoisse qui m'ont étreinte sur les lieux du drame.

Je me trouvais en cours d'histoire de contemporaine, on approchait de la fin du cours et mon ordinateur s'était mis en veille. J'essaye donc de le rallumer ; pas de réaction. Deuxième fois : toujours pas de réaction. J'appuie sur le bouton de démarrage, le système se met en marche mais reste bloqué sur la barre de chargement. Je recommence pour le même résultat. Là, mes nerfs commencent à se tendre sérieusement. Après plusieurs tentatives infructueuses je suis à moitié hystérique et je renonce à taper mon cours, revenant fébrilement au Bic. A la fin du cours je réessaye mais le "système ne parvient pas à réparer les erreurs de démarrage manuellement" et Saty (le nom de mon portable, mignon hein ? ^^) me conseille gentiment d'aller consulter un technicien.

Ha ! Comme si c'était le moment de faire de l'humour ! Je lui réponds, les dents serrées, qu'il n'est peut-être pas au courant mais il supporte à l'heure actuelle l'intégralité de mes cours et que rendre l'âme maintenant reviendrait à m'envoyer directement dans l'asile psychiatrique le plus proche. Il ne le sait peut-être pas non plus mais vendredi j'ai un devoir de contempo de 5h et je ne vois pas comment réviser sans le cours ! (L'hystérie refait surface on dirait...)

Enfin bref, au final, tremblotante, les ongles rongés jusqu'au milieu du bras, je me rends chez Surcouf et implore un dieu de l'informatique de résoudre mon problème. Et là : miracle ! Le gus appuie sur le bouton et Saty s'allume sans rechigner. Grand moment de solitude, je me sens très ridicule et carrément inapte à toute pratique informatique, mais heureusement (enfin, ça dépend du point de vue) il m'annonce que ce bug intergalactique est tout sauf normal et qu'il va dresser une fiche de diagnostics. De la sueur perle sur mon front lorsqu'il m'annonce que je dois restaurer entièrement le système et que le fichier d'erreurs Windows est aussi long que la liste de tout ce que j'ai englouti comme pâtisseries et viennoiseries au cours de cette après-midi de stress intense.

Ni une ni deux, je file chez moi et m'occupe de graver les DVD de restauration, sms nerveusement mon paternel qui accourt chercher un informaticien de renom qui va s'occuper en personne du cas N° 698-SATY (Un peu plus et j'écrivais la plaque d'immatriculation de Twinny... Je veux dire, ma voiture =P) dès jeudi.
Ouf, la catastrophe est évitée.

Bilan de la journée :
- J'ai eu la plus grosse peur de ma vie
- J'ai loupé le cours où je suis la plus nulle et qui nécessite vraiment - au moins - que j'y aille
- J'ai englouti une tonne de trucs atrocement gras
De l'autre paluche :
+ J'ai fini de ficher mon bouquin de moderne
+ J'ai loupé l'anglais et la géo (*.*)
+ J'ai englouti une tonne de trucs atrocement délicieux

Bilan mitigé, donc. Cela dit dès demain je me mets au boulot et surtout au régime. Brigide puisse m'aider à tenir mes bonnes résolutions.

P.S. : oui parce qu'entre temps j'ai constitué mon panthéon personnel et ai constaté que c'était effectivement plutôt utile. Donc je fais des offrandes, je médite, et je prie. Oui, moi. Je prie. J'aurais jamais cru dire ça un jour.


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 Mercredi 13 octobre


Je reviens de la gare. La gare est un lieu très particulier pour la plupart des gens, un lieu de stress, d'angoisse, d'énervement, mais elle l'est plus encore pour moi que pour les autres. Tout simplement parce que depuis plus de cinq ans, la gare est un pont entre les gens que j'aime et moi : Epok tout d'abord, J ensuite. Cette fois-ci, j'allais chercher ma mère qui revenait de Paris. J'ai effectué ce même rituel devenu routinier qui se déroule à chaque fois que je me rends à la gare : la douche, la préparation dans la salle de bain, le brossage des dents avec cette excitation mêlée d'angoisse qu'on ressent lorsqu'on va prendre un train : sera-t-on à l'heure ? Sera-t-il à l'heure ? Y aura-t-il une grève pour perturber le voyage ? Trouvera-t-on sa place ? Pensera-t-on à composter son ticket ?

Autant de questions qui, au fil du temps, ont été remplacées dans ma tête par des interrogations différentes. "Vais-je encore lui plaire ?", "Comment va-t-il réagir en me voyant ?", "Me trouvera-t-il belle ?"; "Que fera-t-on en premier ?" sont devenues systématiques, presque symptomatiques des voyages en train. La routine du retard inhérant au pré-départ; le stress d'avoir oublié quelque chose, les crampes des muscles à force de traîner une valise de cinquante kilos derrière soi pendant qu'on court pour rattraper le train avant que la porte ne se ferme, toutes ces scènes je les connais par coeur. Elles sont devenues ma vie quotidienne, le rituel se reproduisant en moyenne tous les mois, tous les deux mois au plus.

Ensuite vient le déroulement du paysage devant ses yeux pendant plusieurs heures, qui passent à la fois trop doucement et trop vite, et l'arrivée. Pour moi, un voyage en train c'est devenu cela. L'arrivée emmitouflée dans un manteau qui donne trop chaud car notre coeur bat à mille à l'heure, l'agitation tandis qu'on le cherche fébrilement sur le quai, les baisers et les étreintes lorsqu'on l'a trouvé et cette sensation si familière, si réconfortante, qui rend si dépendant : celle de se sentir chez soi, là, dans ses bras. Ensuite, tout semble léger, insouciant. La traversée de la ville, la nuit, les yeux brillants d'excitation, un sourire béat et niais sur le visage.

C'est pour ça que maintenant, pour moi, lorsque je vais dans une gare ou lorsque je marche de nuit dans une ville, ce sont ces images qui me reviennent. Pour moi, une ville de nuit est forcément Louvain, ses bâtiments de brique rouge dont j'ai tant ri, ses fast-foods où j'ai mangé à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit, ses lampadaires vieillots, ses étudiants à moitié éméchés parcourant les rues l'air hagard, son ridicule musée Tintin qui a encombré de travaux une partie entière de la ville pendant des mois, le pont en tournant qui passe juste à côté, entre le ponton du musée et l'un des bâtiments de l'université, et qui donne sur l'entrée d'une résidence et, plus loin, après le restaurant, une volée d'escaliers qui mènent sur une deuxième résidence. Ces deux lieux, je m'y rends mentalement à chaque fois que je suis dans une ville la nuit et que je ferme les yeux. Est-ce parce que c'est là que j'ai marché le plus souvent dans des rues, de nuit, éclairées par les néons des devantures et les lampadaires jaunâtres sous un ciel découvert et à travers une brise glaciale ? Est-ce parce que c'est avec lui que j'ai découvert la beauté de la nuit ? Est-ce une conséquence de ces nombreux hivers entre Sambreville, Namur et Louvain, entre ville et forêt, à commencer des après-midi dans la forêt en l'écoutant me parler des dieux, des celtes, des arbres, des ruisseaux et des oiseaux, et terminées le soir dans la brume, au cinéma ou au restaurant, avant de rentrer en train et de se coucher l'un contre l'autre dans ce lit ridiculement petit de logement étudiant ?

Je ne sais pas. Quoiqu'il en soit, ce cumul en une seule soirée de la gare, la nuit, la température hivernale et moi le visage enfoncé dans mon écharpe et les mains au fond des poches de mon manteau, perdue au milieu de l'obscurité du dehors et les souvenirs à l'intérieur de ma tête me font revivre avec une netteté douloureuse ces moments.
Il y a encore quelques temps ç'aurait été différent. J'aurais eu un espoir, une envie, une certitude peut-être de revivre tout cela un jour. Mais maintenant, ce sentiment a changé. Entre-temps j'ai repris une grande goulée de passé et je me suis rappelé avec peine, larmes, douleur et sang que le réchauffé n'est jamais bon. A présent, si une certitude demeure, c'est que si un jour je parcours à nouveau les rues de Louvain ou de Namur, une nuit d'automne ou d'hiver dégagée et étoilée, ce ne sera plus avec sa main dans la mienne. Ce ne sera plus chez lui que je me rendrai. Ce ne sera plus sa présence que je sentirai près de moi.

Mais celle de quelqu'un d'autre, je l'espère. Qui m'apportera autant de bons moments, différents, et moins de mauvais moments. Et en écrivant ces lignes, si des larmes perlent à mes yeux, ce sont des larmes d'émotion et non de tristesse. Car toutes ces réminiscences qui me laissent rêveuse et joyeuse sont exactement celles que je veux garder ; tous ces bons souvenirs qui me réchauffent de l'intérieur lorsqu'il fait froid dehors et qui me donnent envie d'aller marcher près de la cathédrale un soir de marché de Noël, les mains dans les poches et les yeux dans les étoiles, en songeant aux prochaines villes que j'explorerai et aux bras auxquels je serai accrochée...


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 Dimanche 17 octobre


La plupart du temps je déplore de vivre encore ici. Parce que je suis déjà presque vieille fille à 19 ans (non mais c'est vrai, j'allume de l'encens, j'écris des articles féministes, j'aime les chats, je regarde Dr Quinn Femme Médecin en buvant de la tisane... Mon code génétique est préprogrammé), je m'entends pas très bien avec ma famille, je suis pas très famille d'abord, enfin bref, pour résumer : c'est pas la joie tous les jours.

Mais parfois y'a quand même des journées riches en bonne poilade.
Par exemple, une conversation banale entre deux meilleures amies chacune en prépa (à 500 km de distance mais qu'importe) :

"Ce matin la première chose à laquelle j'ai pensé c'était Hugues Capet. Ma mère a failli me faire internet...ner. Internet. Ner. Décidément j'y arriverai jamais du premier coup."
"Ben moi c'était le malin génie de Descartes."
"Ouhlà, t'es encore pire que moi *déviation de sujet* Je viens de me mettre à hurler ORGANISATION TRANS-ATLANTIQUE NORD comme une démente s'égosillant dans Questions pour un Champion en lisant un article de Miss Tindomerel." (miss-tindomerel.blogspot.com J'espère qu'elle ne m'en voudra pas, entre alsaciennes, mais franchement ça vaut le coup que vous passiez jeter un oeil. Vraiment.)
"Mdrrrr. Personne hurle dans Questions pour un Champion."
"Si. Julien... Je sais plus son blaze, mais Julien hurle. Dommage qu'il n'hurle pas son blaze. Tu l'imagines deux secondes en train d'hurler tel le dément... (Courbet ! Voilà, c'est ça !) COURBEEEET ! avec ses petits papiers voletant partout autour de lui ?"
"T'es totalement dingue, tu vois que t'es pire que moi !"
"Ah non, désolée mais tu penses au malin génie en te réveillant le matin. C'est-à-dire ni plus ni moins que le diable dans sa boîte. C'est vrai, le Malin c'est le diable, et un génie c'est en boîte, une boîte stylisée, certes - Ok, une lampe - mais un genre de boîte. Donc, le malin génie c'est le diable dans sa boîte. Pas façon thon au naturel hein, plutôt façon Aladdin."

Bon, d'accord, je suis peut-être pire qu'Epok. Maintenant que j'y songe je suis quand même bien siphonnée, mais c'est pas de ma faute, tout le monde est siphonné chez moi. Je ne fais que m'incruster dans le décor. C'est vrai, on est vraiment dingues ici, un jour on a failli mettre le feu au salon, à Noël, deux secondes avant que les invités n'arrivent, pour ne citer qu'un exemple qui prouve combien on est doués dans la famille. En général une conversation entre moi et ma mère (comme celle de cet après-midi) peut tourner de la sorte :

Ma mère à l'adresse du voisin qui sortait de la chambre de ma soeur (ça va hein, elle a treize ans, bande de pervers) pour rentrer chez lui : "Oh, Emile, tu pars ? Clara, tu pourrais allumer la lumière à Emile !"
Moi : "C'est vrai, sinon il aura pas la lumière à tous les étages. Déjà qu'il en a pas beaucoup... Des étages."
"Il est pas si petit que ça quand même..."

Sur ce on est parties dans une hilarité puissance dix mille. Hilarité qui n'est rien à côté de la scène qui vient juste de se produire : je rentre innocemment dans le salon, et que vois-je ? La housse de couette de mon frère, dressée au milieu de la pièce, en train de s'agiter telle la danseuse de gigue. Je pousse évidemment un hoquet de terreur, bats violemment en retraite pour chercher du sel, de l'eau bénie, enfin une armada digne de ce nom quoi, quand je vois ma mère se tordre de rire sur le canapé (chose qu'elle ne ferait probablement pas avec autant d'entrain s'il s'était agi d'un vrai esprit, donc je me penche plus en avant sur la situation). Et là que vois-je ? Mon père, en train de s'extraire de ladite housse de couette dans laquelle il était rentré dans sa totalité, en bramant "Je l'ai ! J'ai récupéré les chaussettes !"

Quand je vous dis qu'il se passe des trucs vraiment improbables, ici.



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Mardi 2 novembre


Je n’arrive pas à y croire. Dans deux jours les vacances seront déjà terminées. Terminées ! Dire que j’avais à peine l’impression qu’elles aient commencé ! Qu’est-ce que j’ai fait de mes vacances ? Excellente question.

Disons que les premiers jours je n’ai rien fait d’autre que me reposer – j’ai dormi pendant presque vingt-quatre heures avant de rattraper toute la fatigue accumulée depuis début septembre – et m’occuper de « tâches ménagères », à savoir tout ce que ma mère réclamait de faire et que JE faisais à la place de mes charmants petits frère et sœur. Qui ont respectivement treize et seize ans, et non trois et six ans, comme je tiens à le préciser (cela dit, je m’attarderai quand même une demi-seconde sur le fait que c’est bien pire à treize et seize ans qu’à trois ou six ans, les gosses). Et, s’ils n’étaient pas d’une fainéantise et d’un égoïsme à toute épreuve, seraient donc tout à fait habilités à réaliser.

Enfin bref, passons. Tout ça pour dire que j’ai passé la quasi-totalité de mes vacances au supermarché, jusqu’à ce que je mette le holà et décide de m’enfuir chez mes grands-parents, à la montagne, histoire de prendre l’air, de me rafraîchir les idées, d’effectuer de longues marches restauratrices et tout le toutim.

En vérité j’ai bien plus profité du câble et des quatre-cent chaînes de télé qu’il offre que de l’air pur de la montagne, mais je n’ai quand même pas passé quatre jours à ne rien faire, attention ! Non, j’ai… fiché un chapitre d’un livre de géographie, déjà. Et oui, c’est un exploit, vous le sauriez si vous aussi vous vous y étiez plongé et en étiez ressortis éveillé et en un seul morceau. J’en tire beaucoup de fierté d’ailleurs U.u

Et puis j’ai bougé aussi ! J’ai fait… (tatatatatatata) du vélo !.. D’appartement. Oui, quand même, je n’ai pas subi de lavage de cerveau. Mais c’est la première fois depuis mes dix ans, approximativement, que je montais sur l’engin fallacieux sujet aux chutes diverses et variées, alors on peut applaudir la performance je crois. Là j’ai choisi le biclou de sécurité : sur un pied, posé avec une certitude très réconfortante au sol, sans possibilité de m’envoyer violemment au sol. J’ai donc pris la résolution d’en faire 45 minutes tous les matins, et figurez-vous que je m’y suis tenue. J’ai désigné un jeans spécial biclou, un débardeur léger, et ai sué sang et eau pendant 50 kilomètres en tout, en quatre jours. Impressionnant, hein ? Ce qui l’est nettement moins, c’est que je me suis une fois de plus écorché l’arrière-train en pratiquant l’activité sportive intensive vêtue du jeans, ce qui commence à devenir agaçant, doulourogène et humiliant. Sans parler des cicatrices dudit postérieur.

Loin de moi l’idée de vous entretenir des parties intimes de ma personne, alors changeons de sujet. Sinon j’ai aussi fait de la confiture de coings, j’ai transformé de la confiture de coings carbonisée au goût de sauce barbecue prononcé (sérieusement, c’était de la sauce barbecue ! Et excellente, par-dessus le marché) en compote de fruit délicieuse, j’ai préparé à manger deux fois par jour et j’ai englouti une montagne de pains d’épices au chocolat en regardant des films d’horreur au fond d’un gigantesque lit.

Et évidemment, hier soir, j’ai pratiqué le rituel de Samhain. Mon premier rituel de paganiste confirmée ! Excitant, n’est-ce pas ? Bon, c’est vrai que les conditions n’étaient pas idéales, et qu’au final ça a donné quelque chose d’assez bizarre – comme tous les rituels que j’effectue d’ailleurs. Cette fois ce n’était pas un bout de mouchoir griffonné à l’aide d’un rouge à lèvres et carbonisé de façon totalement hystérique et démente devant un cinéma, non (ça c’était l’année dernière pour le rituel du Lux Nocem, qui est… enfin, je vous expliquerai). Non, j’ai juste été obligée de remplacer les pierres par du charbon, du verre et des bougies en forme de pomme, et me suis vue dans l’impossibilité de pratiquer le rituel en extérieur. J’avais repéré le balcon, lieu idéal à cet exercice : couvert de plantes, sous les étoiles et suffisamment vaste pour installer tout mon matériel. Sauf que pour y accéder je devais traverser le salon avec tout le matériel, vêtue de ma cape de velours super lourde, avant de m’installer devant la baie vitrée du balcon – donnant sur le salon – pour allumer des bougies et incanter des trucs à l’égard des dieux et des morts. Toujours est-il que mon grand-père était dans le salon et que dès que j’ouvrais la porte en me disant qu’il dormait probablement, la télé changeait de chaîne. Immobile, au milieu du couloir, j’ai préféré penser qu’il ne dormait pas plutôt que penser que j’avais eu tort de partir de chez moi sans sel et sans eau bénie, oubliant ma paranoïa naturelle, et que je me retrouvais confrontée à l’esprit en goguette. Donc je me suis établie dans ma chambre et j’ai disposé le cercle de pierres et de bougies sur le lit. Imaginez juste un rituel où il faut tourner autour d’un cercle en récitant des incantations, sans renverser les bougies allumées qui ondulent dangereusement sur la couette dès que vous bougez, et sans mettre le feu à votre cape qui traîne derrière vous dès que vous bougez. Toujours est-il que j’ai réussi, au final ; j’ai découpé des pommes, les ai rendues à la nature en les jetant par la fenêtre de la chambre (qui donne heureusement sur un bout de jardin), ai éteint la bougie sans qu’elle ait embrasé la pièce, enfin tout s’est bien passé mais je n’étais pas très rassurée quand même. Pour le rituel de Yule c’est sûr que je ferai plus attention. Et dans les règles, pour une fois.

Sur ce, les vacances s’achèvent. Déjà. Heureusement, je n’ai qu’un devoir de français avant le week-end, et ensuite que… *calcule rapidement… enfin tout est relatif* Seize heures de cours avant mon week-end prolongé chez Epok. Fighting !


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Vendredi 12 novembre


Eh oui. Je suis encore en vacances. Je sais, c'est vraiment pas juste, mais les chartistes sont des privilégiés, je l'avoue. En l'honneur du 11 novembre et de tous ces pauvres gens morts à la guerre dont on nous rebâche les oreilles en permanence, à nous qui ne pouvons strictement rien à la guerre et compatissons vraiment au fait que des milliers de gens soient morts à cause de la bêtise profonde de quelques uns mais qui pensons aussi que ça commence à bien faire qu'on en parle toutes les douze secondes, en cours comme à la maison, sur internet comme dans la rue, au point que ça ressemble presque à de la culpabilisation collective, je me suis gratifiée d'un week-end prolongé à Paris. Comme je n'ai pas cours le mercredi après-midi, ni le vendredi, et qu'en l'occurrence la compassion de la Première Guerre Mondiale m'a dispensée de mes cours du jeudi, je suis chez Epok jusqu'à dimanche soir.

J'ai été très excitée toute la semaine dernière à l'idée de venir ici, chez ma meilleure amie, dans un appart que j'adore, une famille que j'adore, au milieu de gens que j'adore - assez excitée pour en oublier mes cours de contempo à réviser pour mon devoir de six heures de lundi, hahahaha... Mercredi, en rentrant chez moi à treize heures, j'ai donc préparé mes affaires et suis montée dans le train en fin d'après-midi. Le train. J'anticipais un peu de le reprendre, alors que ça faisait depuis juin que je n'y avais pas mis les pieds. Vous savez bien, les gares et moi nous avons une relation très particulière. Ou... Avions. En tout cas, je craignais qu'un flot de souvenirs m'emporte à nouveau, que je repleure toutes les larmes de mon corps pendant qu'un petit vieux me crachoterait dessus, as usual, mais en fait non. Même pas. Bizarrement, ça allait. J'ai un peu dormi, un peu écouté de musique, et beaucoup relu Harry Potter 7 en risquant le traumatisme profond comme la première fois que je l'ai lu. Mais ce dont je ne me doutais pas, c'est que ça serait beaucoup plus difficile de revenir ici, dans cet appartement plein de souvenirs.

Fort heureusement, la plupart de ces souvenirs sont liés à Epok et moi, en train de chuchoter (bon d'accord, d'hurler à moitié) le soir dans le noir avant de nous endormir (vers quatre heures du matin), en train de se tordre de rire devant un drama asiatique, une série américaine ou tremblant devant un film d'horreur, notre grande spécialité. Sauf qu'au milieu de ces souvenirs agréables s'en cachent d'autre, que je ne parviens pas à effacer de ma mémoire. Lorsque je vais dans le salon et que mon regard se pose sur le balcon, à travers la baie vitrée, je me revois assise sur ses genoux à discuter de mon avenir avec ma mère, Isabelle et Pascal, sa main dans mes cheveux et sa bouche me chuchotant des mots rassurants. Lorsque je croise Aliette, la voisine de pallier, en rentrant dans l'ascenseur, je pense à sa chambre au rez-de-chaussée qu'elle nous prêtait lorsqu'il venait ici avec moi. Dès que je m'assieds sur le canapé je pense aux nombreuses fois où il me tenait dans ses bras et m'embrassait en me disant qu'il m'aimait. Sans cesse ces choses me reviennent, nos fous rires, nos grandes discussions, nos embrassades passionnées. Hier encore j'écrivais dans un e-mail à l'adresse d'une amie "je sors d'une relation de presque trois ans qui m'a laissée détruite et dont je ne suis pas prête de me remettre" ; je m'aperçois maintenant seulement à quel point c'est vrai.

Heureusement, l'élément principal ici, c'est Epok. C'est pour elle que je suis venue, pour la voir, pour qu'on élabore des plans tordus à mettre sur pieds dans nos après-midis de libre, pour qu'on aille rôder dans Paris en croisant des gens plus bizarres les uns que les autres, peut-être en nous faisant courser par un cygne ou un Wendigo, sait-on jamais, ça n'aurait pas été la première fois. Pour toutes ces phrases que l'une commence et l'autre finit, pour celles qui n'ont même pas besoin d'être prononcées parce que nos conversations peuvent aussi bien se dérouler mentalement lorsqu'on a la flemme de parler ou qu'on veut effrayer les gens, parce que c'est la seule qui peut comprendre ce que je raconte quand je parle à toute vitesse en ayant deux barrettes coincées entre les lèvres et la voix d'un boxeur qui vient de perdre toutes ses dents, parce qu'avec elle on ne s'ennuie jamais et parce que je sais que maintenant et pour toujours, nous resterons toujours les meilleures amies du monde. Je sais bien que tout le monde dit ça et que les gens cyniques et blasés répondent "ouais ouais, c'est toujours ce qu'on dit, jusqu'à ce qu'on se fâche, qu'on se perde de vue et qu'on se rappelle même pas de comment s'appelait sa prétendue amie", sauf que nous c'est différent, parce qu'on est des jumelles. On partage le même cerveau, alors si l'une devait partir avec l'autre se retrouverait bien embêtée.

N'est pas Bête à Deux Têtes qui veut U.u



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Jeudi 18 novembre


Aujourd’hui n’était pas ma meilleure journée. J’ai fait un rêve extrêmement bizarre avec mes chats et Chuck Bass cette nuit, je me suis réveillée trop tôt (très mauvais présage, déjà), mon petit-déjeuner s’est soldé par une engueulade monumentale entre ma mère et ma sœur. Ensuite j’ai eu une sale note par cours extrêmement soporifique, tout à la suite, et une colle pas réussie non plus. Et en rentrant j’ai lu un article de Miss-Tindomerel qui disait qu’elle aussi elle avait eu une mauvaise journée alors je me dis que ça devait être une constante de l’Alsace, aujourd’hui.

Mais les mauvaises journées ce n’est jamais grave, parce qu’on se dit toujours que demain une nouvelle journée commence et qu’elle sera meilleure. Et si le lendemain la journée est tout aussi pourrie on se fait la même réflexion, et encore, et encore. Je vais peut-être paraître pessimiste, mais et si la vie c’était toujours aussi pourri ? A quoi bon ? C’est ce que ma mère m’a dit ce soir : « Tu te rends compte ? Tu as dix-neuf ans et tu es déjà aussi pessimiste, tu penses que tu es entourée de cons et que la vie ne sert à rien, alors autant mourir tout de suite », ce à quoi j’ai répondu « Encore deux ans, un mois et trois jours. »

N’empêche qu’elle n’a pas tort. Je sais que je suis pessimiste, mais ce n’est pas grave parce que je me suis toujours dit que quand je serai « grande » ça changerait,  que je devais juste faire des trucs merdiques en attendant que ma vie devienne cool. En attendant que je vive dans une penthouse gigantesque avec jardin sur le toit et terrasse, où j’écrirais toute la journée mes romans à succès et où le soir rentrerait l’homme le plus formidable du monde avec qui je vivrais un véritable rêve. Mes journées consisteraient à me lever à l’heure que je veux, me balader en pyjama ou en méga-t-shirt de groupes jusqu’à midi, écrire avec un chocolat chaud à côté de moi toute la journée, regarder des séries, lire et réécrire toute la nuit. Et de temps en temps je m’habillerais avec des robes Oscar de la Renta, des boucles d’oreilles Mauboussin, des Manolo Blanik’s et j’irais boire un café à cinq euros avec mes copines

Et là vous allez me dire : arrête Gossip Girl et Sex and the City avant qu’il ne soit trop tard. Et vous aurez raison. Toujours est-il que tout le monde espère un avenir rose bonbon, on se dit tous que notre situation merdique est provisoire, qu’on a un certain nombre de merdes à se payer avant de pouvoir vivre notre « vraie vie ». Mais et si c’était ça la vraie vie ? Et si tout n’était qu’un enchaînement de merdes et que notre « vraie vie » idyllique n’existait que dans notre tête ? Parce que là pour l’instant, il faut bien l’avouer, la situation n’est pas bien glorieuse. Je vis avec un échantillon de la partie la plus pitoyable, minable, méprisable, idiote et pathétique de l’être humain (comprendre : mon frère) et sa « copine », renommée Poufiasse Parasitaire par mes soins du fait qu’elle squatte ici comme si elle était chez elle sans la moindre reconnaissance, politesse, gêne de s’imposer chez des gens, non non. Tout est parfaitement normal. Et laissez-moi vous dire qu’ils méritent vraiment aucune charité tous les deux, ce sont deux toxicos, alcooliques, délinquants notoires, menteurs, voleurs, tricheurs et racistes, alors encore que lui doive rester là sous prétexte d’un certain lien du sang, soit, mais alors elle ! Enfin passons, je vais m’énerver sinon.

En plus j’ai un sérieux problème alimentaire qui consiste à me jeter sur n’importe quoi à base de chocolat tous les quatre matins et ensuite me laisser mourir de faim pendant une semaine pour me déculpabiliser. Je suis célibataire, probablement pour le restant de mes jours, je suis en classe prépa et je suis plus allée chez le coiffeur depuis tellement longtemps que mes cheveux me vont jusque dans le bas du dos et sont blonds ! (oui parce que je ne suis pas blonde, seulement châtain clair, et seulement quand je n’ai pas les moyens de me payer le coiffeur).

Alors oui je rêve de la vie idéale de Blair Waldorf, Serena Van der Woodsen, Carrie Bradshaw ou même cette garce d’Elena Gilberts, parce que ma plus grande ambition n’est pas de rester dans cet état végétatif, au contraire, j’aimerais vraiment bien que ma vie à moi aussi devienne un peu… sympa. Pas qu’elle soit atroce, non, je n’ai pas de raison absolue de me plaindre (mais c’est cool quand même de se plaindre des fois). Cela dit si je pouvais publier un bouquin, perdre dix kilos, aller chez le coiffeur et avoir un copain ça serait cool quand même pour un début ^^


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Vendredi 26 novembre


Aujourd'hui il a neigé, toute la journée. Quelques fois de gros flocons duveteux, à d'autres moments une simple brume neigeuse, mais jamais assez pour recouvrir le sol. Non, pas assez pour donner envie de se rouler par terre et de se lever, congelé mais couvert de neige, en riant aux éclats. Pas assez pour donner envie de rire. Juste assez pour donner envie de pleurer.

Aujourd'hui quand je me suis levée, en admiration devant la neige qui tombait par la fenêtre, je n'aurais jamais imaginé que quelques heures plus tard je m'engueulerais suffisamment avec ma mère pour finir prostrée sur le canapé à pleurer toute la journée, alors que j'étais fermement décidée à travailler du matin au soir. Je n'aurais jamais pensé qu'elle me cracherait à quel point toute personne qui a jamais eu le malheur de croiser mon chemin me trouve détestable, insupportable, désagréable. A quel point quoi que je fasse soit destiné à échouer. A quel point j'ai raison quand je dis, sur le ton de la plaisanterie, que je mourrai seule entourée de chats dans l'indifférence générale.

Aujourd'hui je pensais qu'une bonne journée commencerait, je pensais sincèrement que ma vie s'améliorait, que même si ces derniers mois tout partait en charpie sans que je puisse comprendre pourquoi les choses commençaient doucement à s'améliorer. Que malgré tout ce que j'ai eu à encaisser j'arrivais enfin à redresser la barre, à reprendre les choses en main. Je ne sais pas ce qui m'arrive. Je ne sais plus qui je suis, qu'est-ce qu'il se passe autour de moi, je ne comprends plus rien, je ne comprends plus personne et personne ne me comprend plus. Il y a quelques jours la personne dont je me suis le plus éloignée, la seule que j'ai volontairement voulu sortir de ma vie, m'a dit une simple phrase, sortie de nulle part, au point que j'aurais presque cru que je l'avais rêvée. Et le plus incroyable c'est qu'il n'y a que cette personne qui réussit encore à savoir ce que je ressens, instinctivement, sans m'avoir parlé depuis des mois, sans savoir ce que je vis, ce que j'éprouve, juste par hasard. Juste par ce lien bouleversant que je me suis acharnée à essayer de détruire et qui en fait, je viens de m'en apercevoir, n'a jamais fléchi.

Aujourd'hui je me suis enfoncée encore un peu plus dans cet espèce de brouillard opaque dans lequel je patauge depuis ce qui me semble être des siècles. Je croyais qu'à force de me débattre j'en sortirais, mais c'est comme le sable mouvant : plus on bouge, plus on s'embourbe. Aujourd'hui je crois que j'ai perdu ma meilleure amie, la seule qui croyait encore en moi, la seule qui avait encore confiance en moi et en qui je n'ai jamais cessé d'avoir une confiance aveugle.

Aujourd'hui je crois que le monde en a fini avec moi.
Aujourd'hui je crois que j'en ai fini avec le monde.



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Dimanche 5 décembre


Samedi je suis allée au marché de Noël. A la base j’aime pas le marché de Noël, franchement c’est bien sympa de vivre dans la « capitale de Noël », avec le « plus grand marché de Noël de l’est de la France », le « plus grand réseau tram d’Europe », le « plus grand parc d’attraction d’Europe » tout près et la cathédrale la plus ridiculement grande et célèbre parce qu’elle a été construite par des architectes trop nazes qui, d’une, ne se sont pas rendus compte que depuis tout à l’heure si les ouvriers avaient tous les pieds mouillés c’est parce qu’ils construisaient un édifice… dans un marais, et oui ; et qui de deux, une fois cette triste vérité constatée, ont carrément décidé d’abandonner pierres, pioches et bottes aux mains des trolls des marais et de laisser leur église bancale, à moitié embourbée et gravement pas finie en plan.

Bref, nous disions donc que tout ça c’est bien charmant, mais franchement, imaginez-vous la scène : vous êtes une pauvre étudiante (de lycée ou de prépa, au choix, puisque je suis confrontée au cas de figure qui nous occupe depuis cinq interminables années), en retard, forcément, en train de tout faire pour ne pas se gadiner sur les plaques de verglas qui recouvrent les pavés déjà pas droits du tout et fortement bousilleurs de talons de chaussures à la base, avec minimum six kilos de fournitures scolaires sur l’épaule, à deux doigts de s’arracher sous le poids maintenant qu’on en parle, et vous savez pertinemment que la sonnerie va retentir dans douze secondes, et qu’il vous reste encore toute la place de la Cathédrale à traverser. On est lundi matin, votre cœur bat à trois-cent pulsations par minute, et là, dans votre champ de vision, apparaissent… Les cabanes du marché de Noël. Et les douze millions de touristes qui les accompagnent. La terrifiante vérité vous étreint soudain : il n’y a plus qu’un gigantesque melting pot de chinois, japonais, germains, ibériques et mozarellas qui vous séparent d’un billet d’entrée en classe pour cause de retard. Gé-nial.

Le pire c’est que les touristes, eux, ils ne sont jamais pressés. Jamais. Ils partent probablement du principe farfelu que si eux, retraités sexagénaires en mal du pays, sont en vacances, c’est le cas de tout le monde. Déjà que pour les raisons physiques évidentes liées à leur grand âge ils ne sont pas très rapides même quand ils aimeraient bien, inutile de vous faire un dessin pour vous expliquer à quel point ça peut être pénible de devoir attraper chaque vioque sur votre passage par les épaules pour le reposer, lui, son appareil photo, son parapluie et son ridicule bonnet en forme de cigogne, cinquante centimètres plus loin. En plus ils sont aveugles. Non mais vraiment. Des gens qui, au pied de la cathédrale, vous demandent « dites, vous pouvez nous indiquer la cathédrale ? » dans une langue quelconque, j’en ai déjà vu des milliers je crois. Comme si on avait l’air d’avoir le temps de pointer du doigt avec l’air exaspéré au-dessus de leur tête pour leur indiquer que le gros truc rose avec plein de petits bonhommes sculptés, là, c’est pas du tout un magasin de souvenirs.

Toujours est-il que samedi la donne était différente, puisque j’avais réussi à éviter le marché de Noël toute la semaine, et que j’y allais avec Solène. J’ai donc amplement pu profiter des stands, les mêmes que tous les ans mais on les aime quand même, boire un jus d’orange chaud au miel, critiquer le maire qui a eu l’idée totalement saugrenue d’interdire les churros (interdire les churros ! Franchement !), se moquer des touristes déguisés en pères Noël trop ridicules et chercher la baguette flambée à la meilleure qualité/prix de tout Strasbourg. Je lui ai raconté mes blagues de prépa incompréhensibles (du genre « Eh, tu sais quoi, Marine a trouvé un super nom pour renommer Cosmetic Valley : Botox Valley ! Botox ! Comme Silicon Valley ! Hahahaha… Tu rigoles pas ? »), elle m’a expliqué ses cours au nom tout aussi incompréhensibles (« Introduction aux sciences de l’architecture, introduction à ci, introduction à ça… On introduit beaucoup en fait O_o ») et ensuite je l’ai accompagnée chez le coiffeur le plus original que j’ai jamais vu, avec un salon qui ressemblait furieusement au boudoir de la Marquise de Pompadour, et avec qui on a pu critiquer l’élection de Miss France qui se déroulait le soir même. Puis on est allées voir Raiponce au cinéma, même que c’était ma princesse préférée quand j’étais pitite. Et non, on est pas du tout trop grandes pour aller voir Raiponce, d’abord. Le prince m’a fait hurler de rire, la méchante sorcière m’a fait aussi peur que Bathilda Tourdesac et la scène où elle se fait couper tout ses jolis beaux cheveux blonds et très longs qui s’illuminent et qu’elle se retrouve avec dix kilomètres de cheveux bruns et morts dans sa tour a failli me faire décéder d’horreur. Mais la scène avec les lanternes qui s’élèvent dans le ciel quand ils sont sur la barque devant le royaume était vraiment troooooop mignonne *.* Bref, passons.

Il faut dire que c’était la meilleure journée de ma semaine. Et des deux semaines à venir. Parce que, admettons-le franchement, ma plus grande réussite de la semaine dernière c’est d’avoir réussi à retenir mon identifiant pour accéder à ma banque en ligne et les semaines à venir ne s’annoncent guère mieux. Riches en mauvaises notes à profusion, travail jusqu’à ce que trépas s’ensuive et épreuves de six heures qui s’enchaînent pour bien s’assurer qu’on va creuser nous-mêmes notre tombe. Et là je me dis que franchement, si le marché de Noël, qui était à l’époque – bénie et insouciante – du lycée, au bon vieux temps, ma période honnie de l’année, devient aujourd’hui ma meilleure expérience depuis… quelques semaines – idées proprement terrifiante, je vous l’annonce – c’est vraiment que rien ne va

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